Vente de chevaux : disparition de la présomption d'antériorité
SUPPRESSION DE LA PRESOMPTION D’ANTERIORITE (GARANTIE DE CONFORMITE) ET GARANTIE DES VICES CACHES
L’adoption définitive de loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt en ce qu’elle contient une modification du Code rural et notamment l’article L 213-1 et suivants du Code rural, était attendu par tous les professionnels vendeurs de chevaux.
L’article 42 de la loi est ainsi rédigé : « 1° Les références : « des articles L. 211-1 à L. 211-15 » sont remplacées par les références : « des articles L. 211-1 à L. 211-6, L. 211-8 à L. 211-15 » ;° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :« La présomption prévue à l'article L. 211-7 du même code n'est pas applicable aux ventes ou échanges d'animaux domestiques. »
Depuis la promulgation de l’ordonnance du 17 février 2005, qui a inséré la garantie de conformité dans le droit Français, l’article L211-7 du code de la consommation prévoyait que, lors d’une vente entre un vendeur professionnel et un acheteur consommateur, tout défaut survenant au bien dans les 6 mois suivant la livraison du bien par le professionnel était présumé préexister à la vente.
Cette disposition était applicable aux ventes d’animaux domestiques ce qui permettait aux acheteurs consommateurs de ne plus avoir à prouver l’antériorité du défaut qui apparaissait dans un délai de 6 mois suivant la livraison de l’animal. Le vendeur devait donc rapporter la preuve contraire, le doute profitant à l’acheteur.
Or, sur de la matière vivante, qui évolue en permanence, et notamment en fonction de l’utilisation (bonne ou mauvaise qui en est faite), de l’entretien (régulier ou non) ou encore de l’exploitation (proportionnée ou abusive), le délai de 6 mois peut se révéler injuste pour le vendeur professionnel.
En outre, la loi ayant prévu la possibilité d’une action sur le fondement de la garantie de conformité dans un délai de deux ans à compter de la livraison, les acheteurs consommateurs étaient même convaincus qu’ils avaient un délai de deux ans pour restituer le cheval, ce qui était parfaitement inexact car au-delà des 6 mois, l’acheteur devait prouver à la fois la gravité et le caractère caché, mais aussi l’antériorité du défaut, ce qui devenait très compliqué.
Dans le même temps, la disposition de l’ordonnance du 17 février 2005, qui avait modifié le bref délai de l’article1648 du Code civil en permettant désormais à l’acheteur d’agir dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice (alors qu’avant l’acheteur devait agir à bref délai soit dans les quelques mois), était passé totalement inaperçue dans le monde du cheval. Pourquoi ce désintérêt pour les vices cachés ? Parce qu’à la suite de plusieurs arrêts rendus entre 2001 et 2002 par la Cour de cassation, cette dernière avait indiqué que la garantie de droit dans les ventes d’animaux domestiques étaient la garantie des vices rédhibitoires (seuls 6 défauts étaient visés, tic cornage, immobilité, emphysème, uvéite, boiterie ancienne intermittente) où l’acheteur doit agir dans le délai de 10 jours (30 pour l’uvéite) qui suit la livraison.
Ainsi, exit la convention dérogatoire implicite qui permettait aux acheteurs systématiquement d’agir contre leur vendeur sur le fondement de la garantie de conformité. Aussi, si vous étiez consommateur achetant à un professionnel, vous étiez protégé à l’excès grâce à cette présomption d’antériorité du défaut durant 6 mois. En revanche, dans tous les autres cas, notamment si vous achetiez à un non professionnel ou si vous étiez vous-même professionnel, vous étiez confronté à l’incertitude de voir le Tribunal juger que votre seule garantie ne durait que 10 jours après la livraison.
Or, concernant la possibilité pour l’acheteur d’agir sur le fondement de la garantie des vices caché, les juges du fond et surtout la Cour de cassation, ont progressivement évolués pour admettre le retour à ce qui nous paraît être un juste équilibre.
Aussi, comme en matière de garantie des vices cachés, l’acheteur devra donc prouver l’antériorité du défaut à la vente.
On ne peut que se réjouir d’une telle mesure qui tend vers un équilibre de la relation acheteur-vendeur car la durée de 6 mois était bien trop longue, le cheval étant une matière vivante et, par là-même, rapidement altérable !
En toutes hypothèses, si le défaut survient rapidement après la vente, il sera aisé à l’acheteur d’en rapporter la preuve.
Cette disposition s’applique aux ventes conclues à partir du 15 octobre 2014.
Notre conseil : rien n’empêche l’acheteur de convenir avec le vendeur d’une garantie conventionnelle prévoyant un délai (1 mois par exemple) durant lequel tout défaut apparaissant dans ce délai entraînera la résolution de la vente, sans que la preuve de l’antériorité de ce défaut ne soit à rapporter.
Texte intégral de la loi : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000029573022&dateTexte=&categorieLien=id
Maître Blanche de GRANVILLIERS – Avocat à la Cour – Membre de l’Institut du Droit Equin.
Hortense OZMU – Juriste Droit du Sport-Droit Equin – Membre de l’Institut du Droit Equin.
Octobre 2014
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