CA COLMAR 23 avril 2010 : Nullité de la vente d’un cheval sur le fondement de l’erreur.
Publié le :
23/04/2010
23
avril
avr.
04
2010
L’acheteur déçu invoque régulièrement, à titre principal ou subsidiaire, la nullité de la vente de son cheval sur le fondement de l’erreur.
Commentaire de l’arrêt de la Cour d’Appel 2ème ChCiv de Colmar du 23 avril 2010.
L’acheteur déçu invoque régulièrement, à titre principal ou subsidiairement, la nullité de la vente de son cheval sur le fondement de l’erreur. Néanmoins, l’examen des décisions nous enseigne que la nullité pour erreur est désormais rarement prononcée par les juridictions, et cet arrêt nous fournit un exemple supplémentaire.
Depuis un arrêt célèbre du 14 mai 1996, l’acquéreur ne peut plus agir en nullité de la vente chaque fois que le défaut invoqué est la conséquence d’un vice caché : la voie de la nullité pour erreur est fermée en présence d’un vice qui rend la chose impropre à l’usage. L’erreur s’est ainsi vu privée d’un large champ d’application, mettant ainsi fin à la pratique des conseils des acheteurs qui invoquaient l’erreur (délai pour agir de 5 ans) conjointement avec l’action en garantie des vices cachés, (à cette époque soumise au bref délai).
Les Tribunaux n’hésitent d’ailleurs pas sur le fondement de l’article 12 du CPC à requalifier sur le fondement des vices cachés, les demandes des acheteurs basées sur une action en nullité de la vente. (Cf. arrêt CA NIMES du 19/05/2009)
L’erreur pour être admise doit porter sur les qualités substantielles, entendez les qualités essentielles de l’animal, et l’acquéreur doit démontrer qu’elles ne correspondent pas aux qualités attendues et convenues avec le vendeur. L’erreur peut toujours être invoquée par l’acquéreur qui se plaint d’un défaut qui n’est pas physique mais comportemental, comme c’était le cas en l’espèce dans l’affaire jugée par la Cour d’appel de COLMAR : L’acheteuse faisait valoir qu’elle avait souhaité acquérir une monture calme et polyvalente pour un usage de loisir et débuter en compétition amateur, étant précisé que le cheval avait été acquis pour la somme relativement élevée de 7.300 €. Or elle soutenait que mis au travail, le cheval s’était rapidement révélé rétif et capricieux et elle produisait de nombreux témoignages à l’appui de ses dires. Toutefois, la Cour confirma le jugement l’ayant débouté de ses demandes, considérant que le changement dans le comportement du cheval ne présentait pas un caractère inné, antérieur à la vente, mais pouvait être dû à un changement dans les conditions d’hébergement et dans la manière dont il était désormais traité. La Cour ajoutait que le seul fait que le cheval n’obtienne pas de classement en épreuves n’était pas constitutif d’un comportement caractériel et dangereux. Deux enseignements peuvent être tirés de cette décision. Tout d’abord comme indiqué en préambule, le rétrécissement du rôle joué par l’erreur dans la mise à néant des ventes des chevaux. En effet cette décision peut être rapprochée d’un arrêt de la CA ORLEANS du 2 avril 2009 rendue dans des circonstances un peu similaire, où l’acheteur sollicitait la nullité pour erreur de la vente d’une jument acquise 18.000€, n’ayant eu que peu de performances en compétition et dont le comportement lors des épreuves sportives n’était pas celui espéré par l’acheteur. Les magistrats semblent être sensibles au fait que le cheval est un animal, que son comportement est influencé par son environnement et le traitement dont il est l’objet. Sauf si le cheval est notoirement dangereux, en soi l’absence de résultat en compétition, où le fait qu’il soit difficile à manier, ne justifie pas ipso facto une nullité de la vente.
L’acquéreur aurait-il pu avoir gain de cause sur un autre fondement ? L’acquéreur plaidait également le dol du vendeur, mais sans aucune preuve selon la Cour. Une action basée sur la garantie de conformité, aurait-elle pu prospérer ? Celle-ci suppose un vendeur professionnel et un acheteur consommateur. A supposer que les conditions tenant à la qualité des parties aient été remplies, il n’est pas certain dans cette affaire, que l’acheteur ait obtenu gain de cause, sur le fondement des seules attestations produites : La Cour avait notamment relevé que ces attestations n’étaient pas toutes probantes sur la dangerosité de l’animal. On ne peut que conseiller à l’acheteur qui se plaint d’un comportement inadéquat de l’animal de solliciter avant toute chose la désignation d’un expert judiciaire dont les conclusions si elles sont favorables lui permettront de disposer d’un élément probatoire plus sérieux que des attestations qui sont rarement unanimes et souvent contredites par les attestations de l’adversaire. Pour conclure, on constate que la résolution est largement admise lorsque le cheval souffre d’un défaut physique précisément identifié, mais qu’elle est plus difficile à obtenir lorsque l’acheteur se plaint d’un défaut dans le comportement de l’animal acquis, dont le mental interdit ou réduit l’utilisation.
Historique
-
TI de St Nazaire, 19 mars 2014: cheval confié contre bons soins abattu
Publié le : 27/05/2014 27 mai mai 05 2014Actus du cabinet / Droit ÉquinUne propriétaire vend son cheval pour une somme modique contre bons soins, ce...
-
TGI de Foix, 5 mars 2014: la responsabilité du maréchal ferrant
Publié le : 27/05/2014 27 mai mai 05 2014Actus du cabinet / Droit ÉquinUn maréchal procède au ferrage d’une jument de compétition, laquelle se trouv...
-
La présomption d’antériorité du vice n’est plus applicable aux ventes ou échanges d’animaux domestiques !
Publié le : 28/04/2014 28 avril avr. 04 2014Actus du cabinet / Droit ÉquinLe 15 avril dernier, le Sénat a opéré un revirement en matière d’application...
-
L’hippodrome responsable à l’égard des jockeys, concurrents d’une course hippique.
Publié le : 11/10/2013 11 octobre oct. 10 2013Actus du cabinet / Droit ÉquinEn cas d’accident, l’hippodrome peut être déclaré responsable à l’égard d...
-
Présomption d’antériorité du défaut de conformité et vente de chevaux
Publié le : 01/10/2013 01 octobre oct. 10 2013Actus du cabinet / Droit ÉquinActus du cabinet / Droit civil (02)Le projet de loi relatif à la consommation adopté par le SENAT le 13 sept...
-
Les garanties de l’acheteur dans une vente aux enchères de chevaux
Publié le : 24/09/2013 24 septembre sept. 09 2013Actus du cabinet / Droit ÉquinQuelles sont les garanties dont bénéficient l’acquéreur d’un cheval lors d’un...
-
Le parieur peut-il faire condamner le jockey ?
Publié le : 11/09/2013 11 septembre sept. 09 2013Actus du cabinet / Droit ÉquinArticle paru dans PARIS TURF le samedi 7 septembre 2013 Le joc...
-
Droit équin : du nouveau en matière de garantie de conformité
Publié le : 27/03/2013 27 mars mars 03 2013Actus du cabinet / Droit ÉquinTGI de La rochelle, 21 novembre 2012, n°11/02835 Décision du T...
-
La responsabilité des accidents en compétition : et si Guerdat avait été grièvement blessé ?
Publié le : 19/03/2013 19 mars mars 03 2013Actus du cabinet / Droit ÉquinL’accident du champion olympique Steve Guerdat lors de la warm-up du jump...
-
CA GRENOBLE, 1er octobre 2012 : un cheval blessé en pension pré/box
Publié le : 31/01/2013 31 janvier janv. 01 2013Actus du cabinet / Droit ÉquinCet arrêt rendu par la Cour d’appel de GRENOBLE est assez surprenant. Il...
-
Cour d’appel de Nancy, 6 mars 2012, sur le "contrat d’exploitation avec mandat de vente"
Publié le : 25/10/2012 25 octobre oct. 10 2012Actus du cabinet / Droit ÉquinActus du cabinet / Droit civil (02)Pour la Cour d’appel de NANCY, le contrat d’exploitation d’un cheval avec man...
-
CA ANGERS 15 décembre 2011 : déboute un entraîneur driver, victime d’un dommage en course, à l’encontre du fabricant de la lice installée sur le champ de course
Publié le : 06/04/2012 06 avril avr. 04 2012Actus du cabinet / Droit ÉquinActus du cabinet / Préjudice CorporelUn entraîneur driver victime de dommages en courses, débouté de sa demand...
-
CA PARIS 28 mars 2011 : L’entraîneur driver, victime d’un dommage corporel, actionne en responsabilité une société de course, organisatrice.
Publié le : 28/03/2011 28 mars mars 03 2011Actus du cabinet / Droit ÉquinActus du cabinet / Droit civil (02)Actus du cabinet / Préjudice CorporelLe contentieux des accidents sportifs est fourni et récurent. La victime...
-
COUR DE CASSATION 4 novembre 2010 : la théorie de l’acceptation des risques dans le domaine sportif.
Publié le : 04/11/2010 04 novembre nov. 11 2010Actus du cabinet / Droit ÉquinL’arrêt de la Cour de Cassation du 4 novembre 2010 marque la fin de la th...
-
CA COLMAR 23 avril 2010 : Nullité de la vente d’un cheval sur le fondement de l’erreur.
Publié le : 23/04/2010 23 avril avr. 04 2010Actus du cabinet / Droit ÉquinL’acheteur déçu invoque régulièrement, à titre principal ou subsidiaire,...