Le vendeur doit-il s'assurer avant une visite d'achat ?
LE VENDEUR DOIT-IL S'ASSURER AVANT UNE VISITE D'ACHAT ? : « C'EST AU PROPRIÉTAIRE D'APPORTER LA PREUVE D'UNE FAUTE ÉVENTUELLE DU VÉTÉRINAIRE »
Jour de Galop annonçait le 28 juin dernier la mort brutale d'une pouliche d'exception Lesstalk In Paris (Cape Cross).
Sur le point d'être vendue, la jument de Jean-Louis Tepper a subi un examen médical à la demande de l'acheteur potentiel et lors de la fouille, son rectum a été déchiré. Ce genre d'accident est fort heureusement assez rare, mais aucun propriétaire n'est à l'abri de connaître un jour la même tragédie.
Le Syndicat national des Propriétaires a souhaité apporter ses conseils et l'éclairage de son service juridique représenté par Blanche de Granvilliers - avocate et membre de l'Institut du Droit Equin - à tous les lecteurs de Jour de Galop.
Lors d'un examen médical en vue d'un passage en vente, qui va supporter les risques d'un accident ?
Si rien n'est prévu, les risques sont à la charge du vendeur. Toutefois, il est possible de négocier avec l'acheteur potentiel pour déterminer qui supportera les risques encourus lors d'un examen vétérinaire comportant des risques, ..
Quand un vétérinaire pratique un fouille rectale manuelle ou une échographie pour vérifier l’appareil gynécologique d'un jument, il existe un risque - certes faible, mais le plus souvent mortel- de déchirure du rectum. Philippe Lassalas, Vétérinaire expert à la Cour d'appel de Versailles, précise que le risque est de 1 pour 20.000 palpations.
Dans quel cas le vétérinaire est-il considéré comme fautif ?
L'exploration rectale est ce que l'on appelle un examen de confort. Dans ce cas là, les tribunaux exigent que le vétérinaire rapporte la preuve du consentement éclairé du propriétaire qui doit être informé du risque de lacération rectale.
Si le propriétaire est un éleveur professionnel, il ne pourra ignorer le risque de lacération compte-tenu de son activité professionnelle. En revanche, si le propriétaire est non-professionnel, le vétérinaire doit rapporter la preuve par tout moyen – mais l'écrit sera préférable– que le propriétaire était informé des risques mortels de lacération rectale. C'est le vétérinaire qui supporte la charge de la preuve.
S'il y a manquement à l'obligation d'information, la responsabilité du vétérinaire peut être engagée mais sera appréciée en terme de perte de chance pour le propriétaire d'avoir renoncé à l'examen et conservé la jument en vie. Il y aura donc une indemnisation partielle du préjudice du propriétaire qui tiendra compte de la valeur de la jument et des poulains éventuels qu'elle aurait pu avoir.
Si le vétérinaire rapporte cette preuve de consentement éclairé, est-ce alors le propriétaire qui devra supporter l'ensemble de la responsabilité ?
Pas forcément car le Vétérinaire doit donner des soins consciencieux et conformes aux données acquises de la science vétérinaire, Le propriétaire garde la possibilité de démontrer que le vétérinaire a commis une faute dans l'acte médical lui-même. Cette fois-ci, ce sera au propriétaire de démontrer l'existence de cette faute
La provocation d'une déchirure rectale lors d'un examen est-elle en elle-même considérée comme une faute ?
Pas du tout. La lacération rectale peut survenir sans qu'aucune faute ne puisse être reprochée au vétérinaire. En revanche, le praticien peut être considéré comme fautif lorsque l'échographie était inutile ou que la jument était mal attachée ou encore lorsque le vétérinaire a agi brutalement : Si la jument se débat ou se montre nerveuse, le vétérinaire doit repousser son examen et attendre de meilleures conditions pour la manipuler.
Si le vétérinaire est reconnu fautif, il y a cette fois une indemnisation totale du préjudice subi par le propriétaire (valeur de la jument, éventuelle perte de chance des poulains à naître).
Le propriétaire du cheval sera-t-il systématiquement indemnisé ?
Si le cheval est assuré mortalité, le propriétaire percevra en principe la prime par sa compagnie d'assurance. C'est l'assureur qui se chargera éventuellement de la procédure servant à déterminer si l'accident est dû à une faute du vétérinaire ou non. Sinon, s'il n'y a pas eu de faute du praticien et si le cheval n'était pas assuré, le propriétaire n'obtiendra aucune indemnité.
Quelle est donc la première chose à faire pour un propriétaire se retrouvant dans un cas similaire ?
Il faut déterminer si l'accident est dû à une faute du vétérinaire ou non et surtout ne pas croire que la responsabilité du praticien sera systématique. Le meilleur moyen d'obtenir des preuves d'une éventuelle faute est de se rapprocher d'un conseil spécialisé qui mettra en place une mesure d'expertise judiciaire pour déterminer les circonstances de l’accident.
LA SOLUTION PROPOSÉE PAR LE SYNDICAT DES PROPRIÉTAIRES
Le Syndicat national des Propriétaires préconise de réfléchir à la mise en place d'une assurance spécifique et ponctuelle pour un cheval de grande valeur notamment lorsque ce dernier va subir des examens à risques. Ainsi, un vétérinaire proposerait systématiquement au propriétaire de souscrire à une assurance complémentaire pour un examen précis d'un cheval identifié si la valeur de celui-ci excède le plafond des indemnités prévu par le contrat d'assurance du vétérinaire.
Maître Blanche de GRANVILLIERS
Juillet 2014
Historique
-
Accident en compétition et responsabilité de l'organisateur
Publié le : 30/08/2014 30 août août 08 2014Actus du cabinet / Droit ÉquinLe décès du cheval DORADO appartenant à la cavalière Costaricaine Claudia ROM...
-
Chute de cheval: indemnisation de la cavalière par l’assurance du propriétaire du cheval.
Publié le : 23/08/2014 23 août août 08 2014Actus du cabinet / Droit ÉquinL’absence de transfert de la garde du cheval à la victime permet l’ indemnisa...
-
Centres équestres et associations sportives : quelles responsabilités ?
Publié le : 31/07/2014 31 juillet juil. 07 2014Actus du cabinet / Droit ÉquinÀ chaque type de prestation de tourisme équestre correspond (ou pas) un type...
-
Qualification juridique du tourisme équestre et incidences fiscales
Publié le : 25/07/2014 25 juillet juil. 07 2014Actus du cabinet / Droit ÉquinLa dénomination de tourisme équestre revêt des formes juridiques très diver...
-
Le vendeur doit-il s'assurer avant une visite d'achat ?
Publié le : 11/07/2014 11 juillet juil. 07 2014Actus du cabinet / Droit ÉquinLE VENDEUR DOIT-IL S'ASSURER AVANT UNE VISITE D'ACHAT ? : « C'EST AU PROPRIÉ...
-
TGI Foix, 5 mars 2014 : Le maréchal-ferrant est-il soumis aux règles du dépôt salarié ?
Publié le : 03/07/2014 03 juillet juil. 07 2014Actus du cabinet / Droit ÉquinCe jugement du TGI de FOIX nous donne l’occasion de revenir sur les règles go...
-
Le contrat de valorisation d’un poney de sport avec option d’achat : les précautions à prévoir et les pièges à éviter
Publié le : 04/06/2014 04 juin juin 06 2014Actus du cabinet / Droit ÉquinA titre préliminaire, il convient de rappeler que le droit français prévoit q...
-
TI de St Nazaire, 19 mars 2014: cheval confié contre bons soins abattu
Publié le : 27/05/2014 27 mai mai 05 2014Actus du cabinet / Droit ÉquinUne propriétaire vend son cheval pour une somme modique contre bons soins, ce...
-
TGI de Foix, 5 mars 2014: la responsabilité du maréchal ferrant
Publié le : 27/05/2014 27 mai mai 05 2014Actus du cabinet / Droit ÉquinUn maréchal procède au ferrage d’une jument de compétition, laquelle se trouv...
-
La présomption d’antériorité du vice n’est plus applicable aux ventes ou échanges d’animaux domestiques !
Publié le : 28/04/2014 28 avril avr. 04 2014Actus du cabinet / Droit ÉquinLe 15 avril dernier, le Sénat a opéré un revirement en matière d’application...
-
Le bon père de famille passe à la trappe
Publié le : 24/03/2014 24 mars mars 03 2014Actus du cabinet / Droit civil (02)Le 21 janvier dernier, L'Assemblée nationale a adopté un amendement supp...
-
L’hippodrome responsable à l’égard des jockeys, concurrents d’une course hippique.
Publié le : 11/10/2013 11 octobre oct. 10 2013Actus du cabinet / Droit ÉquinEn cas d’accident, l’hippodrome peut être déclaré responsable à l’égard d...
-
Présomption d’antériorité du défaut de conformité et vente de chevaux
Publié le : 01/10/2013 01 octobre oct. 10 2013Actus du cabinet / Droit ÉquinActus du cabinet / Droit civil (02)Le projet de loi relatif à la consommation adopté par le SENAT le 13 sept...
-
Le droit de rompre unilatéralement le contrat, même à durée déterminée : Révolution ou simple évolution ?
Publié le : 29/09/2013 29 septembre sept. 09 2013Actus du cabinet / Droit civil (02)En droit français, par application de l’article 1184 du Code Civil, il es...
-
Les garanties de l’acheteur dans une vente aux enchères de chevaux
Publié le : 24/09/2013 24 septembre sept. 09 2013Actus du cabinet / Droit ÉquinQuelles sont les garanties dont bénéficient l’acquéreur d’un cheval lors d’un...