Cour d’appel de Nancy, 6 mars 2012, sur le "contrat d’exploitation avec mandat de vente"
Publié le :
25/10/2012
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Pour la Cour d’appel de NANCY, le contrat d’exploitation d’un cheval avec mandat de vente est un contrat de dépôt salarié et la responsabilité de l’exploitant est donc aggravée.
Voilà un arrêt qui ne manquera pas d’intéresser au plus haut point tous ceux, professionnels ou non, qui prennent des chevaux en contrat d’exploitation et devra les inciter à la plus extrême prudence dans l’hypothèse où un dommage surviendrait au cheval, même si, en définitive, la décision a rejeté les demandes du propriétaire du cheval décédé.
Un exploitant de centre Equestre propriétaire d’un cheval, confie celui-ci à une personne avec pour mission de l’exploiter en compétition et le vendre. Le cheval est transporté par l’exploitant sur un terrain de concours pour participer à un concours. Le cheval se blesse grièvement dans le camion alors qu’il avait été laissé dans le véhicule dans l’attente de son épreuve.
L’arrêt commenté se prononce au préalable sur la qualification du « contrat d’exploitation avec mandat de vente ». Constitue-t-il ou non en partie un contrat de dépôt et le cas échéant, est-ce un dépôt à titre gratuit ou onéreux ? De la qualification du contrat découlent les règles applicables à celui-ci et comment on apprécie la responsabilité du dépositaire en cas de dommages. Si la solution est nécessairement impactée par cette qualification, en l’espèce la juridiction d’appel confirme le jugement ayant débouté le propriétaire, bien qu’en retenant une qualification différente. Le Tribunal avait invité les parties à débattre sur la qualification du contrat : existence d’un dépôt salarié ou non ? Le Jugement de première instance avait retenu que le contrat devait être pour partie qualifié de contrat de dépôt, mais un dépôt à titre gratuit compte car celle qui cherchait à vendre le cheval n’avait pas la qualité de professionnelle.
La Cour de cassation avait déjà jugé le 23 janvier 1996 que le contrat de dépôt-vente, comme son nom l’indique, obéissait (partiellement tout au moins) aux règles du dépôt. Le contrat « d’exploitation, avec mandat de vente » soumet le dépositaire aux obligations nées du dépôt. La Cour de cassation avait cité l’article 1927 du Code civil, sur le dépôt à titre gratuit.
La Cour d’appel de Nancy ne suivit pas le raisonnement du Tribunal : elle jugea que le contrat s’analysait d’une part en un mandat de vente (ce qui n’était pas contesté) et d’autre part « en un contrat de dépôt salarié rémunéré par les gains du concours » autrement dit en un contrat de dépôt salarié. On s’étonne de cette qualification notamment au regard de la faiblesse des allocations perçues lors des épreuves sportives qui couvrent rarement le seul coût des engagements, sans parler des frais de transport et autres frais induits par la compétition. La solution nous paraît inédite et mérite en ce sens d’être soulignée au regard des conséquences de cette qualification sur la responsabilité du dépositaire, qui en l’espèce a cependant réussi à échapper à toute condamnation.
Depuis un arrêt rendu par la Cour de cassation le 3 juillet 2001 (Ch. Civile GEDJ C/ LHOMME), la jurisprudence, pour déterminer la responsabilité du dépositaire, recherche dans quel cadre le dommage subi par le cheval est intervenu : le dommage est-il intervenu dans le cadre du dépôt proprement dit, lorsque le cheval ne fait l’objet d’aucune intervention, parce qu’il est au repos, dans son box ou au pré, ou bien le dommage est-il intervenu dans le cadre de son utilisation, qu’il s’agisse d’un entraînement, d’un débourrage de son exploitation, ou encore en vue d’une saillie. Dans le premier cas ce sont bien les règles du dépôt salarié qui s’appliquent. Dans le second, ce sont les règles du contrat d’entreprise, avec les incidences que l’on connaît sur la preuve.
Tant le jugement que l’arrêt ont considéré que le cheval se trouvait bien dans le cadre du dépôt. Cette solution n’allait pas de soi. En effet le cheval se trouvait dans un camion, mais dans l’attente de sa participation à une épreuve. Etait-il vraiment au repos ? Ce n’est pas certain. Sa présence sur un terrain de concours et la perspective de l’épreuve rend son comportement différent, et l’accident qui s’est produit le confirme. Il a ainsi été jugé que le cheval qui est sorti du box en vue d’être attelé, n’est plus dans le cadre du dépôt mais de son entraînement. Quoi qu’il en soit les deux juridictions ont jugé que les règles du dépôt salarié étaient bien applicables.
Le dépositaire salarié est tenu d’une obligation de surveillance et de restitution, dont il peut s’exonérer en prouvant son absence de faute, s’agissant d’une obligation de moyen renforcée. Toutefois, la jurisprudence concomitante et postérieure à l’arrêt du 3 juillet 2001 a été plus loin, jusqu’à faire reposer sur le dépositaire une véritable obligation de résultat à laquelle il ne peut échapper « qu’en prouvant qu’il n’a pas commis de faute dans la survenance du dommage, autrement dit en justifiant d’un cas précis de force majeure ou fortuit, circonstance qui doit être extérieure, imprévisible et irrésistible ». (Cf Cour Appel de CAEN 6/05/2000 ; Cour Appel de CAEN 3/10/2000 ;Cour Cass. 10/01/1990 Bull. civ I n°6 p.5. ; Bull. IDE 2001, comm. Cour Appel de REIMS 7/03/2001 ; Bull. IDE sept. 1999, Ch. Civ. I 5/01/1999 Contrat, Conc, Consom. 1999, 51 note Leveneur ; Cass. 1ère Civ., 20 juillet 1994, Bull. 1 n°256, page 185. CA CAEN 27 Juin 2006)). Ces décisions ont été confirmées par d’autres décisions rendues postérieurement et notamment par la Cour d’appel de CAEN le 11 mars 2009, (BARDIN C/ GROUPAMA GOUIN) mais aussi par Tribunal de Grande Instance de MACON (Cf TGI de MACON 6 mars 2006 Bull. juridique n°43 septembre 2006)
Dans le même sens, la Cour d’appel de DIJON, le 9 octobre 2007 (Bull. juridique n°48 décembre 2007), à la suite du décès d’un poulain mis dans un pré avec d’autres poulains, déclarait nulle la clause exonératoire de responsabilité insérée par le Haras dépositaire, au motif que le haras avait manqué à son obligation essentielle de tout mettre en œuvre pour garder la chose confiée et la restituer. Plus récemment le Tribunal de Grande Instance de CHARTRES, (RG n°10/00001 TGI 13 avril 2011), jugeait encore, toujours à l’occasion d’une jument décédée à la suite de blessures dans un pré, que « le dépositaire est présumé responsable de toute dégradation du bien confié à sa garde » ce qui démontre que la jurisprudence est passée allègrement d’une présomption de faute à une présomption de responsabilité, ce qui est bien différent : si la première permet au dépositaire de s’exonérer par la preuve qu’il n’a pas commis de faute notamment parce qu’il a apporté à l’animal les mêmes soins que ceux qu’il a prodigués à son propre animal, en revanche, la présomption de responsabilité l’oblige à démontrer le cas fortuit émanant de la victime ou d’un tiers, ou la force majeure.
Sur ce point pourtant, la Cour d’appel a approuvé les premiers juges qui ont estimé que la dépositaire démontrait n’avoir commis aucune faute ; la Cour d’appel a fait sienne la définition traditionnelle de l’obligation de moyen renforcée qui permet au débiteur de s’exonérer en démontrant son absence de faute. C’est essentiellement au regard des attestations produites par la dépositaire et de son recours immédiat au vétérinaire de garde à la suite de l’accident que la Cour a pu considérer, en application de son pouvoir souverain, qu’elle rapportait la preuve de son absence de faute et a confirmé le jugement ayant débouté la propriétaire du cheval de toute indemnisation.
Si en l’espèce le dépositaire échappe à une condamnation, la qualification de « contrat d’exploitation avant mandat de vente » de dépôt salarié a des conséquences non négligeables pour l’exploitant, qui pourrait avoir intérêt à stipuler dans le contrat, que le cheval est exploité en compétition gratuitement, compte tenu des frais engendrées largement supérieurs aux gains de concours escomptés.
COUR D’APPEL DE NANCY première chambre civile ARRÊT N°673 /2012 DU 06 MARS 2012 Numéro d’inscription au répertoire général : 11/00089 - 11/001454 Décision déférée à la Cour : Déclarations d’appel principal en date du 07 Janvier 2011 et d’appel provoqué du 6 juin 2011d’un jugement du Tribunal de Grande Instance de BRIEY, R.G.n° 07/00974, en date du 25 mars 2010, APPELANTE SUR APPELPRINCIPAL DU 7 JANVIER 2011 : Madame Sylvie F. née le [...], demeurant [...], Représentée par la SCP MILLOT-LOGIER ET FONTAINE, avocats au barreau de ANCY, précédemment constitués en qualité d’avoués, plaidant par Maître GOSSIN, avocat au barreau de NANCY, INTIMÉE SUR APPEL PRINCIPAL DU 7 JANVIER 2011 ET APPELANTE SUR APPEL PROVOQUE DU 6 JUIN 2011 : Madame Emilie L. demeurant [...], Représentée par Maître Lucile NAVREZ, avocat au barreau de NANCY, constituée aux lieu et place de la SCP CHARDON NAVREZ, avoués précédemment constitués, plaidant par Maître Thomas KREMSER, avocat au barreau de BRIEY, INTIMEE SUR APPEL PROVOQUE DU 6 JUIN 2011 : SB VET EXERCANT SOUS L’ENSEIGNE CLINIQUE VETERINAIRE SAINT BERNARD, dont le siège est [...], prise en la personne de ses représentants légaux pour ce domiciliés audit siège, Représentée par Maître Thierry GRETERE, avoué constitué jusqu’ à l’ordonnance de désistement partiel du 4 octobre 2011, COMPOSITION DE LA COUR : L’affaire a été débattue le 31 Janvier 2012, en audience publique devant la Cour composée de : Monsieur Guy DORY, Président de Chambre, entendu en son rapport, Monsieur Gérard SCHAMBER, Conseiller, Madame Joëlle ROUBERTOU, Conseiller, qui en ont délibéré ; Greffier, lors des débats : Madame DEANA ; A l’issue des débats, le Président a annoncé que l’arrêt serait rendu par mise à disposition au Greffe le 06 Mars 2012, en application de l’ article 450 alinéa 2 du code de procédure civile , ARRÊT : contradictoire , rendu par mise à disposition publique au greffe le 06 Mars 2012 , par Madame DEANA, Greffier, conformément à l’ article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ; signé par Monsieur Guy DORY, Président, et par Madame DEANA, Greffier ;
Copie exécutoire délivrée le à Copie délivrée le à
FAITS ET PROCÉDURE : Dans le cadre d’un ’contrat d’exploitation avec mandat de vente’, Madame F. a confié le cheval dont elle était propriétaire à Madame L. en vue de sa vente, avec hébergement chez cette dernière et possibilité pour elle de le sortir en compétition ; le cheval, transporté sur un terrain de concours hippique par Madame L., s’est gravement blessé dans le camion de transport ; l’animal a dû être euthanasié ; Par acte du 26 février 2007 , Madame F. a assigné Madame L. devant le Tribunal de Grande Instance de BRIEY en responsabilité aux fins de dommages et intérêts ; Par ordonnance en date du 19 juillet 2007, l’affaire a été radiée du rôle ; Par acte du 14 mars 2008 , Madame L. a fait appeler en la cause la société d’exercice libéral à responsabilité limitée SB VET, exerçant sous l’enseigne ’Clinique vétérinaire Saint Bernard’ aux fins de garantie ; Par jugement avant dire droit en date du 9 juillet 2009, le Tribunal de Grande Instance de BRIEY a ordonné la réouverture des débats et invité les parties à conclure sur le moyen de droit relevé d’office, tiré de l’application des règles du contrat de dépôt ; Madame F. a invoqué la responsabilité contractuelle de Madame L. le fondement des articles 1147 et 1927 du Code civil ; et à titre principal l’obligation de résultat qui pesait sur Madame L. en vertu du contrat d’exploitation avec mandat de vente ; à titre subsidiaire, elle a invoqué un manquement de Madame L. à son obligation de sécurité de moyens ; elle a soutenu que le cheval aurait dû être sorti du camion à l’arrivée sur le terrain hippique et non laissé seul harnaché dans le camion ; elle a fait valoir que le transport de l’animal sans protection aux jambes constituait une faute ; elle a également soutenu que la camionnette utilisée pour le transport n’était pas conforme aux normes de sécurité ; elle a sollicité la réparation de son préjudice matériel correspondant aux frais de vétérinaire engagés et au remboursement de la valeur de l’équidé ; elle a également demandé la réparation de son préjudice moral subi du fait de l’euthanasie de l’animal ; sur le moyen de droit relevé d’office dans le jugement avant dire droit, Madame F. a rappelé que le dépositaire était tenu, en application des articles 1927 et suivants du Code civil de restituer au déposant identiquement la chose qu’il a reçue et qu’il était tenu des détériorations survenues de son fait ; Madame L. a conclu au débouté des demandes de Madame F. ; elle a fait valoir que cette dernière ne démontrait pas les conditions dans lesquelles l’accident dont elle se prévalait était survenu et qu’aucun élément ne permettait d’engager sa responsabilité ; elle a rappelé ne pas être un professionnel de l’équitation ; elle a fait valoir que le contrat passé avec Madame F. était à titre gratuit ; elle a soutenu n’avoir commis aucune faute ; elle a, en effet, fait valoir que l’accident était imprévisible et irrésistible ; elle a soutenu ensuite que le cheval avait bien été protégé au niveau des quatre membres et qu’elle était présente à ses côtés au moment de l’accident ; elle a ajouté qu’elle avait utilisé un camion expressément prévu pour le transport des chevaux et qu’elle avait immédiatement fait intervenir un vétérinaire ; elle a fait valoir que seul le second accident (chute dans un box) survenu chez le vétérinaire était à l’origine de l’euthanasie ; sur le moyen de droit relevé d’office dans le cadre du jugement avant dire droit, elle a soutenu avoir apporté au cheval qui lui était confié les mêmes soins que s’il s’agissait du sien et n’avoir donc commis aucune faute ; La société SB VET a conclu l’appel en garantie ; elle a contesté la survenance d’un second accident au sein de la clinique ; elle a soutenu que le vétérinaire n’était tenu à l’égard du propriétaire de l’animal que d’une obligation de moyens quant aux soins prodigués et qu’aucune faute n’était en l’espèce prouvée à son encontre ; elle a également fait valoir que, face à la gravité des lésions subies par l’animal, il aurait été proposé dès l’arrivée de ce dernier à la clinique son euthanasie, mais que Madame L. l’aurait refusée ; elle a soutenu que l’animal aurait dû être euthanasié car les cicatrices n’avaient pas résisté au poids de l’animal et à ses mouvements ; Par jugement en date du 25 mars 2010, le Tribunal de Grande Instance de BRIEY a : Débouté Madame Sylvie F. de ses demandes, Condamné Madame Sylvie F. à payer à Madame Emilie L. la somme de 1.300euro au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, Condamné Madame Emilie L. à payer à la société SB VET la somme de 1.000euro au titre de l’ article 700 du Code de Procédure Civile , Condamné Madame Sylvie F. aux entiers dépens de l’instance et autorisé Maître KREMSER, avocat aux offres de droit, à recouvrer directement contre celle-ci ceux des dépens dont il a fait l’avance sans avoir reçu provision. Pour statuer ainsi, le Tribunal a retenu que le contrat qualifié de ’contrat d’exploitation avec mandat de vente’ devait être qualifié pour partie de contrat de dépôt ; il a rappelé que le dépositaire n’était tenu que d’une obligation de moyens ; il a retenu qu’en cas de détérioration de la chose déposée, il appartenait au dépositaire, pour s’exonérer, de rapporter la preuve qu’il y était étranger, soit en établissant qu’il avait donné à cette chose les mêmes soins que pour la garde des choses lui appartenant, soit en démontrant la survenance d’un cas de force majeure ; il a rappelé que le contrat avait été conclu à titre gratuit et que Madame L. n’avait pas la qualité de professionnel ; il a ajouté que cette dernière avait transporté le cheval dans le véhicule qu’elle utilisait pour le transport de son propre cheval ; il a rejeté la qualification de faute pour le fait d’avoir laissé le cheval dans le camion ; il a rappelé que deux attestations produites par Madame L. faisaient état de protections des membres de l’animal lors de l’accident et de la présence de cette dernière au moment des faits ; il a retenu que Madame L. avait mis en oeuvre les soins appropriés en appelant immédiatement le vétérinaire ; il a décidé que, si l’accident n’était pas un événement imprévisible et irrésistible constituant un cas de force majeure, Madame L. justifiait cependant avoir apporté à l’animal des soins attentifs conformes à ceux qu’elle aurait apporté à son propre animal ; Madame F. a interjeté appel de cette décision par déclaration en date du 7 janvier 2011. Madame L. a formé un appel provoqué par déclaration en date du 6 juin 2011 ; Par ordonnance en date du 28 juin 2011, les deux affaires ont été jointes ; Par acte du 14 septembre 2011 , Madame L. s’est désistée de son appel (cf ordonnance du 4 octobre 2011 ) ; A l’appui de son appel et dans ses dernières conclusions en date du 16 août 2011, Madame F. soutient que les soins donnés au cheval pour le garder après son transport n’ont pas été appropriés, prudents et conformes à ce qu’il était possible d’attendre d’un mandataire diligent et attentif ; elle soutient, en effet, que le dépositaire n’a pas assuré à l’animal les mêmes soins qu’il a assuré à son propre cheval ; que des soins adaptés au statut de jeune cheval auraient dû être mis en oeuvre ; que l’initiative de laisser un jeune cheval seul dans un camion après avoir retiré le premier était gravement inadéquate et contraire aux bonnes pratiques et a favorisé la survenance de l’accident ; elle considère que le dépositaire aurait dû louer l’un des boxes démontables traditionnellement mis à la disposition des cavaliers sur tous les terrains de concours ; elle soutient, en outre, que Madame L. n’était pas présente au moment de l’accident et que ce n’est que lorsque le jury l’a fait appeler qu’elle s’est rendue sur place pour secourir le cheval ; elle ajoute que, Madame L. ayant souscrit une obligation de dépositaire devait remplir les obligations y afférentes en bon père de famille et en cohérence avec la pratique de l’équitation ; elle ajoute que la nature des lésions exclut de surcroît la présence de bandes de transport ou de protections spéciales ; que l’indication de ce que le cheval était harnaché permet de supposer qu’il avait déjà été préparé pour être monté lorsqu’il a été laissé dans le camion, ce qui est, selon elle, une prise de risque supplémentaire et explique l’absence de protection des membres ; elle soutient ensuite que le contrat passé avec Madame L. n’a pas été conclu à titre gratuit, dans la mesure où il prévoyait, selon elle, une contrepartie rémunérée sous la forme d’une commission ainsi que la possibilité pour le dépositaire de conserver les gains éventuels hors concours ; elle en déduit qu’il s’agissait d’un contrat salarié ; elle fait valoir que le camion utilisé pour le transport présentait une mangeoire inadaptée, mal élaborée ayant pu provoquer, selon elle, les blessures subies par le cheval ; elle rappelle que les indications données quant à la dangerosité de la mangeoire, son positionnement et à sa présence dans le camion résultent d’un aveu écrit de l’intimée ; elle soutient que l’obligation de moyens qui incombait à Madame L. n’a pas été respectée et que cette dernière a enfreint des règles élémentaires de sécurité ; concernant le montant du préjudice, Madame F. fait valoir que son dommage matériel s’élève à 2.095, 82 euros de factures vétérinaires ; elle ajoute que la compagnie d’assurance avec laquelle elle avait entrepris des pourparlers a fixé comme valeur de couverture pour le cheval 10.000 euros ; elle en déduit que la demande de réparation sur une base de 8.500 euros est justifiée ; Par conséquent, Madame F. demande à la Cour de : Déclarer l’appel interjeté par Madame F. recevable et bien fondé, Y faisant droit, Infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions, Statuant à nouveau : Vu les articles 1921 et suivants du Code Civil , Vu l’ article 1147 du Code Civil , Consacrer la responsabilité de Madame L. dans l’accident dont a été victime le cheval de Madame F., Condamner Madame L. à réparer l’entier préjudice subi par Madame F. Fixer le montant du dommage à 10.595,82 euros correspondant au préjudice matériel, Condamner également Madame L. à 2.000 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral, La condamner enfin à 2.000euro en application de l’ article 700 du Code de Procédure Civile , Condamner Madame L. aux entiers dépens de première instance et d’appel dont distraction pour ces derniers au profit de la SCP MILLOT LOGIER & FONTAINE, Avoués aux offres de droit. Dans ses dernières conclusions en date du 10 octobre 2011, Madame L. répond qu’il s’agissait d’une pension à titre gratuit ; elle fait valoir qu’elle a donné à l’animal les mêmes soins que pour la garde de son propre cheval et qu’elle n’a commis aucune faute ; elle avance que le cheval a été pris de panique sans raison particulière ; elle soutient qu’il ressort de deux attestations versées au débat qu’elle était bien sur place à côté du cheval au moment des faits ; elle ajoute qu’il était normal que le cheval reste dans le camion au vu des mauvaises conditions climatiques de ce jour là ; que d’ailleurs, le cheval n’était pas enfermé dans la mesure où le camion était resté ouvert sur son côté gauche ; elle soutient qu’étant donné la nature calme du cheval et le temps passé sur place qui ne dépassait pas une ou deux heures, la location d’un box n’était pas justifiée ; elle fait également valoir que le cheval était bien protégé au niveau des quatre membres de la même façon que le montre la photographie versée aux débats ; elle ajoute que l’animal a été blessé au-dessus de ses protections ; elle souligne que Madame F. a elle-même approuvé les bonnes conditions de transport après avoir visité le camion ayant servi au transport de l’animal ; que le véhicule était adapté au transport des chevaux et ne contenait aucune mangeoire ; elle fait également valoir qu’elle a immédiatement fait intervenir un vétérinaire ; Il est finalement demandé à la Cour de : Déclarer l’appel interjeté par Madame Sylvie F. mal fondé, La débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions contraires aux présentes, Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Madame Sylvie F. de l’intégralité de ses demandes dirigées à l’encontre de Mademoiselle Emilie L., Y ajoutant, Condamner Madame Sylvie F. à payer à Mademoiselle L. la somme supplémentaire de 1.000 euros sur le fondement de l’ article 700 du Code de Procédure Civile en sus des 1.300 euros précédemment alloués par le premier juge, A titre subsidiaire, Faire droit à l’appel provoqué incident de Mademoiselle Emilie L. à l’encontre de la clinique vétérinaire d’AMNEVILLE, Pour le cas où la Cour réformait la décision entreprise et entrait en voie de condamnation à l’encontre de Mademoiselle L. au profit de Madame F., Condamner la clinique vétérinaire d’AMNEVILLE sur le fondement de l’ article 1147 du Code Civil à garantir intégralement Mademoiselle L. des condamnations qui seraient prononcées à son encontre, Dans cette hypothèse, Condamner la clinique vétérinaire à payer à Mademoiselle L. une somme de 1.000 euros en application des dispositions de l’ article 700 du Code de Procédure Civile , Condamner Madame Sylvie F. et la clinique vétérinaire d’AMNEVILLE aux entiers dépens de première instance et d’appel lesquels seront recouvrés directement par la SCP CHARDON-NAVREZ, Avoués associés, conformément aux dispositions de l’ article 699 du Code de Procédure Civile . SUR CE : Eu égard au desistement partiel, il ne sera pas tenu compte des demandes de Madame L. envers la société SB VET ; Attendu qu’il résulte du contrat du 19 mars 2006, intitulé ’contrat d’exploitation avec mandat de vente’, que Madame F. a confié le cheval ’Lieutenant Dunbar Jyca’ à Madame L. en vue de sa vente avec hébergement de l’animal et possibilité de l’utiliser en compétition ; que tous les frais inhérents au cheval étaient à la seule charge de Madame L. qui, le cas échéant, pouvait conserver la totalité des gains en concours ; Que dans ces conditions, il y a lieu de considérer que le contrat doit s’analyser d’une part en un mandat de vente, d’autre part en un contrat de dépôt salarié, rémunéré par les gains de concours ; Attendu que le dépositaire à titre onéreux ne peut s’exonérer de l’obligation de moyens à laquelle il est tenu qu’en rapportant la preuve soit de son absence de faute, soit d’un événement de force majeure, soit du fait du déposant (cf cass. Civ.1ere 29/1/2002 n° 99-19.316) ; Attendu en l’espèce que c’est par des motifs pertinents que la Cour adopte que le premier juge a retenu que dans le cadre sus-indiqué, la responsabilité de Madame L. ne pouvait être engagée, alors qu’elle démontrait qu’elle n’avait commis aucune faute ; qu’il ressort en effet des différentes attestations produites que Madame L. a procédé au transport et à la mise en attente de l’animal dans des conditions habituellement mises en oeuvre par des pratiquants expérimentés de l’équitation (Madame B., Melle V., Melle D.), sans devoir recourir à l’utilisation d’un box, inutile en de telles circonstances en raison de la durée réduite de l’épreuve équestre (Melle S., Melle V.) ; que le véhicule utilisé n’était pas équipé d’une mangeoire et était adapté au transport des chevaux (Madame C.) ; Qu’il apparaît encore au vu de l’attestation de Melle D. que le cheval était sous la surveillance de celle-ci et équipé de protections de transport ; que Madame L. a réagi très rapidement et demandé l’assistance du vétérinaire de garde ; Qu’au vu de ces éléments de droit, et de fait, il y a lieu de confirmer le jugement ; Que succombant en son recours, l’appelante sera condamnée aux dépens d’appel, outre le paiement à Madame L. de la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’ article 700 du Code de Procédure Civile . PAR CES MOTIFS : LA COUR, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, CONFIRME le jugement déféré ; CONDAMNE Madame Sylvie F. à payer à Madame Emilie L. la somme de MILLE EUROS (1.000 euros) sur le fondement de l’ article 700 du Code de Procédure Civile ; CONDAMNE Madame F. aux dépens d’appel qui pourront être directement recouvrés par Me NAVREZ, conformément à l’ article 699 du Code de Procédure Civile . Le présent arrêt a été signé par Monsieur DORY, Président de la première Chambre Civile de la Cour d’Appel de NANCY, et par Madame DEANA, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. Signé : C. DEANA.- Signé : G. DORY.- Minute en huit pages.
Décision Antérieure Tribunal de grande instance Briey du 25 mars 2010 n° 07/00974
Note de la Rédaction : Critère(s) de sélection : décision très motivée
Abstract Contrat, qualification du contrat, cheval confié en vue de sa vente avec hébergement de l’animal et possibilité de l’utiliser en compétition avec conservation des gains, mandat de vente (oui), dépôt intéressé (oui), dépôt rémunéré par les gains des concours. Contrat, contrat de dépôt, classification des dépôts, dépôt intéressé, responsabilité contractuelle du dépositaire (non), inexécution de l’obligation de restitution, décès de l’animal, euthanasie à la suite d’une blessure lors d’un transport, preuve rapportée par le dépositaire de son absence de faute (oui), animal transporté pour un concours hippique, véhicule adapté au transports des chevaux, animal équipé de protections de transport, cheval sous la surveillance du déposant, assistance du vétérinaire de garde immédiatement sollicitée. © LexisNexis SA
TEXTE INTEGRAL DE L’ARRET
Cour d’appel Nancy, Chambre civile 1, 6 Mars 2012 Confirmation N° 673 /2012, 11/001454, 11/00089 Madame Sylvie F. Madame Emilie L., SB VET EXERCANT SOUS L’ENSEIGNE CLINIQUE VETERINAIRE SAINT BERNARD Contentieux Judiciaire Numéro JurisData : 2012-018581 Résumé Il résulte du contrat du 19 mars 2006, intitulé "contrat d’exploitation avec mandat de vente", que la propriétaire du cheval a confié ce dernier en vue de sa vente avec hébergement de l’animal et possibilité de l’utiliser en compétition avec conservation de la totalité des gains en concours. Ce contrat doit s’analyser d’une part en un mandat de vente, d’autre part en un contrat de dépôt salarié, rémunéré par les gains de concours. Le dépositaire à titre onéreux ne peut s’exonérer de l’obligation de moyens à laquelle il est tenu qu’en apportant la preuve soit de son absence de faute, soit d’un événement de force majeure, soit du fait du déposant. En l’espèce, la responsabilité de la déposante ne peut être engagée, car elle démontrait qu’elle n’a commis aucune faute. Le cheval s’est blessé lors d’un transport pour un concours hippique et a dû être euthanasié. Il est établi, par les attestations produites, que le véhicule était adapté au transports des chevaux, que l’animal était équipé de protections de transport, qu’il était sous la surveillance de la déposante, qui a réagi immédiatement en demandant l’assistance du vétérinaire de garde. Le dépositaire doit donc être débouté de sa demande d’indemnisation. FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISCOUR D’APPEL DE NANCY première chambre civile ARRÊT N°673 /2012 DU 06 MARS 2012 Numéro d’inscription au répertoire général : 11/00089 - 11/001454 Décision déférée à la Cour : Déclarations d’appel principal en date du 07 Janvier 2011 et d’appel provoqué du 6 juin 2011d’un jugement du Tribunal de Grande Instance de BRIEY, R.G.n° 07/00974, en date du 25 mars 2010, APPELANTE SUR APPELPRINCIPAL DU 7 JANVIER 2011 : Madame Sylvie F. née le [...], demeurant [...], Représentée par la SCP MILLOT-LOGIER ET FONTAINE, avocats au barreau de ANCY, précédemment constitués en qualité d’avoués, plaidant par Maître GOSSIN, avocat au barreau de NANCY, INTIMÉE SUR APPEL PRINCIPAL DU 7 JANVIER 2011 ET APPELANTE SUR APPEL PROVOQUE DU 6 JUIN 2011 : Madame Emilie L. demeurant [...], Représentée par Maître Lucile NAVREZ, avocat au barreau de NANCY, constituée aux lieu et place de la SCP CHARDON NAVREZ, avoués précédemment constitués, plaidant par Maître Thomas KREMSER, avocat au barreau de BRIEY, INTIMEE SUR APPEL PROVOQUE DU 6 JUIN 2011 : SB VET EXERCANT SOUS L’ENSEIGNE CLINIQUE VETERINAIRE SAINT BERNARD, dont le siège est [...], prise en la personne de ses représentants légaux pour ce domiciliés audit siège, Représentée par Maître Thierry GRETERE, avoué constitué jusqu’ à l’ordonnance de désistement partiel du 4 octobre 2011, COMPOSITION DE LA COUR : L’affaire a été débattue le 31 Janvier 2012, en audience publique devant la Cour composée de : Monsieur Guy DORY, Président de Chambre, entendu en son rapport, Monsieur Gérard SCHAMBER, Conseiller, Madame Joëlle ROUBERTOU, Conseiller, qui en ont délibéré ; Greffier, lors des débats : Madame DEANA ; A l’issue des débats, le Président a annoncé que l’arrêt serait rendu par mise à disposition au Greffe le 06 Mars 2012, en application de l’ article 450 alinéa 2 du code de procédure civile , ARRÊT : contradictoire , rendu par mise à disposition publique au greffe le 06 Mars 2012 , par Madame DEANA, Greffier, conformément à l’ article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ; signé par Monsieur Guy DORY, Président, et par Madame DEANA, Greffier ;
Copie exécutoire délivrée le à Copie délivrée le à
FAITS ET PROCÉDURE : Dans le cadre d’un ’contrat d’exploitation avec mandat de vente’, Madame F. a confié le cheval dont elle était propriétaire à Madame L. en vue de sa vente, avec hébergement chez cette dernière et possibilité pour elle de le sortir en compétition ; le cheval, transporté sur un terrain de concours hippique par Madame L., s’est gravement blessé dans le camion de transport ; l’animal a dû être euthanasié ; Par acte du 26 février 2007 , Madame F. a assigné Madame L. devant le Tribunal de Grande Instance de BRIEY en responsabilité aux fins de dommages et intérêts ; Par ordonnance en date du 19 juillet 2007, l’affaire a été radiée du rôle ; Par acte du 14 mars 2008 , Madame L. a fait appeler en la cause la société d’exercice libéral à responsabilité limitée SB VET, exerçant sous l’enseigne ’Clinique vétérinaire Saint Bernard’ aux fins de garantie ; Par jugement avant dire droit en date du 9 juillet 2009, le Tribunal de Grande Instance de BRIEY a ordonné la réouverture des débats et invité les parties à conclure sur le moyen de droit relevé d’office, tiré de l’application des règles du contrat de dépôt ; Madame F. a invoqué la responsabilité contractuelle de Madame L. le fondement des articles 1147 et 1927 du Code civil ; et à titre principal l’obligation de résultat qui pesait sur Madame L. en vertu du contrat d’exploitation avec mandat de vente ; à titre subsidiaire, elle a invoqué un manquement de Madame L. à son obligation de sécurité de moyens ; elle a soutenu que le cheval aurait dû être sorti du camion à l’arrivée sur le terrain hippique et non laissé seul harnaché dans le camion ; elle a fait valoir que le transport de l’animal sans protection aux jambes constituait une faute ; elle a également soutenu que la camionnette utilisée pour le transport n’était pas conforme aux normes de sécurité ; elle a sollicité la réparation de son préjudice matériel correspondant aux frais de vétérinaire engagés et au remboursement de la valeur de l’équidé ; elle a également demandé la réparation de son préjudice moral subi du fait de l’euthanasie de l’animal ; sur le moyen de droit relevé d’office dans le jugement avant dire droit, Madame F. a rappelé que le dépositaire était tenu, en application des articles 1927 et suivants du Code civil de restituer au déposant identiquement la chose qu’il a reçue et qu’il était tenu des détériorations survenues de son fait ; Madame L. a conclu au débouté des demandes de Madame F. ; elle a fait valoir que cette dernière ne démontrait pas les conditions dans lesquelles l’accident dont elle se prévalait était survenu et qu’aucun élément ne permettait d’engager sa responsabilité ; elle a rappelé ne pas être un professionnel de l’équitation ; elle a fait valoir que le contrat passé avec Madame F. était à titre gratuit ; elle a soutenu n’avoir commis aucune faute ; elle a, en effet, fait valoir que l’accident était imprévisible et irrésistible ; elle a soutenu ensuite que le cheval avait bien été protégé au niveau des quatre membres et qu’elle était présente à ses côtés au moment de l’accident ; elle a ajouté qu’elle avait utilisé un camion expressément prévu pour le transport des chevaux et qu’elle avait immédiatement fait intervenir un vétérinaire ; elle a fait valoir que seul le second accident (chute dans un box) survenu chez le vétérinaire était à l’origine de l’euthanasie ; sur le moyen de droit relevé d’office dans le cadre du jugement avant dire droit, elle a soutenu avoir apporté au cheval qui lui était confié les mêmes soins que s’il s’agissait du sien et n’avoir donc commis aucune faute ; La société SB VET a conclu l’appel en garantie ; elle a contesté la survenance d’un second accident au sein de la clinique ; elle a soutenu que le vétérinaire n’était tenu à l’égard du propriétaire de l’animal que d’une obligation de moyens quant aux soins prodigués et qu’aucune faute n’était en l’espèce prouvée à son encontre ; elle a également fait valoir que, face à la gravité des lésions subies par l’animal, il aurait été proposé dès l’arrivée de ce dernier à la clinique son euthanasie, mais que Madame L. l’aurait refusée ; elle a soutenu que l’animal aurait dû être euthanasié car les cicatrices n’avaient pas résisté au poids de l’animal et à ses mouvements ; Par jugement en date du 25 mars 2010, le Tribunal de Grande Instance de BRIEY a : Débouté Madame Sylvie F. de ses demandes, Condamné Madame Sylvie F. à payer à Madame Emilie L. la somme de 1.300euro au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, Condamné Madame Emilie L. à payer à la société SB VET la somme de 1.000euro au titre de l’ article 700 du Code de Procédure Civile , Condamné Madame Sylvie F. aux entiers dépens de l’instance et autorisé Maître KREMSER, avocat aux offres de droit, à recouvrer directement contre celle-ci ceux des dépens dont il a fait l’avance sans avoir reçu provision. Pour statuer ainsi, le Tribunal a retenu que le contrat qualifié de ’contrat d’exploitation avec mandat de vente’ devait être qualifié pour partie de contrat de dépôt ; il a rappelé que le dépositaire n’était tenu que d’une obligation de moyens ; il a retenu qu’en cas de détérioration de la chose déposée, il appartenait au dépositaire, pour s’exonérer, de rapporter la preuve qu’il y était étranger, soit en établissant qu’il avait donné à cette chose les mêmes soins que pour la garde des choses lui appartenant, soit en démontrant la survenance d’un cas de force majeure ; il a rappelé que le contrat avait été conclu à titre gratuit et que Madame L. n’avait pas la qualité de professionnel ; il a ajouté que cette dernière avait transporté le cheval dans le véhicule qu’elle utilisait pour le transport de son propre cheval ; il a rejeté la qualification de faute pour le fait d’avoir laissé le cheval dans le camion ; il a rappelé que deux attestations produites par Madame L. faisaient état de protections des membres de l’animal lors de l’accident et de la présence de cette dernière au moment des faits ; il a retenu que Madame L. avait mis en oeuvre les soins appropriés en appelant immédiatement le vétérinaire ; il a décidé que, si l’accident n’était pas un événement imprévisible et irrésistible constituant un cas de force majeure, Madame L. justifiait cependant avoir apporté à l’animal des soins attentifs conformes à ceux qu’elle aurait apporté à son propre animal ; Madame F. a interjeté appel de cette décision par déclaration en date du 7 janvier 2011. Madame L. a formé un appel provoqué par déclaration en date du 6 juin 2011 ; Par ordonnance en date du 28 juin 2011, les deux affaires ont été jointes ; Par acte du 14 septembre 2011 , Madame L. s’est désistée de son appel (cf ordonnance du 4 octobre 2011 ) ; A l’appui de son appel et dans ses dernières conclusions en date du 16 août 2011, Madame F. soutient que les soins donnés au cheval pour le garder après son transport n’ont pas été appropriés, prudents et conformes à ce qu’il était possible d’attendre d’un mandataire diligent et attentif ; elle soutient, en effet, que le dépositaire n’a pas assuré à l’animal les mêmes soins qu’il a assuré à son propre cheval ; que des soins adaptés au statut de jeune cheval auraient dû être mis en oeuvre ; que l’initiative de laisser un jeune cheval seul dans un camion après avoir retiré le premier était gravement inadéquate et contraire aux bonnes pratiques et a favorisé la survenance de l’accident ; elle considère que le dépositaire aurait dû louer l’un des boxes démontables traditionnellement mis à la disposition des cavaliers sur tous les terrains de concours ; elle soutient, en outre, que Madame L. n’était pas présente au moment de l’accident et que ce n’est que lorsque le jury l’a fait appeler qu’elle s’est rendue sur place pour secourir le cheval ; elle ajoute que, Madame L. ayant souscrit une obligation de dépositaire devait remplir les obligations y afférentes en bon père de famille et en cohérence avec la pratique de l’équitation ; elle ajoute que la nature des lésions exclut de surcroît la présence de bandes de transport ou de protections spéciales ; que l’indication de ce que le cheval était harnaché permet de supposer qu’il avait déjà été préparé pour être monté lorsqu’il a été laissé dans le camion, ce qui est, selon elle, une prise de risque supplémentaire et explique l’absence de protection des membres ; elle soutient ensuite que le contrat passé avec Madame L. n’a pas été conclu à titre gratuit, dans la mesure où il prévoyait, selon elle, une contrepartie rémunérée sous la forme d’une commission ainsi que la possibilité pour le dépositaire de conserver les gains éventuels hors concours ; elle en déduit qu’il s’agissait d’un contrat salarié ; elle fait valoir que le camion utilisé pour le transport présentait une mangeoire inadaptée, mal élaborée ayant pu provoquer, selon elle, les blessures subies par le cheval ; elle rappelle que les indications données quant à la dangerosité de la mangeoire, son positionnement et à sa présence dans le camion résultent d’un aveu écrit de l’intimée ; elle soutient que l’obligation de moyens qui incombait à Madame L. n’a pas été respectée et que cette dernière a enfreint des règles élémentaires de sécurité ; concernant le montant du préjudice, Madame F. fait valoir que son dommage matériel s’élève à 2.095, 82 euros de factures vétérinaires ; elle ajoute que la compagnie d’assurance avec laquelle elle avait entrepris des pourparlers a fixé comme valeur de couverture pour le cheval 10.000 euros ; elle en déduit que la demande de réparation sur une base de 8.500 euros est justifiée ; Par conséquent, Madame F. demande à la Cour de : Déclarer l’appel interjeté par Madame F. recevable et bien fondé, Y faisant droit, Infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions, Statuant à nouveau : Vu les articles 1921 et suivants du Code Civil , Vu l’ article 1147 du Code Civil , Consacrer la responsabilité de Madame L. dans l’accident dont a été victime le cheval de Madame F., Condamner Madame L. à réparer l’entier préjudice subi par Madame F. Fixer le montant du dommage à 10.595,82 euros correspondant au préjudice matériel, Condamner également Madame L. à 2.000 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral, La condamner enfin à 2.000euro en application de l’ article 700 du Code de Procédure Civile , Condamner Madame L. aux entiers dépens de première instance et d’appel dont distraction pour ces derniers au profit de la SCP MILLOT LOGIER & FONTAINE, Avoués aux offres de droit. Dans ses dernières conclusions en date du 10 octobre 2011, Madame L. répond qu’il s’agissait d’une pension à titre gratuit ; elle fait valoir qu’elle a donné à l’animal les mêmes soins que pour la garde de son propre cheval et qu’elle n’a commis aucune faute ; elle avance que le cheval a été pris de panique sans raison particulière ; elle soutient qu’il ressort de deux attestations versées au débat qu’elle était bien sur place à côté du cheval au moment des faits ; elle ajoute qu’il était normal que le cheval reste dans le camion au vu des mauvaises conditions climatiques de ce jour là ; que d’ailleurs, le cheval n’était pas enfermé dans la mesure où le camion était resté ouvert sur son côté gauche ; elle soutient qu’étant donné la nature calme du cheval et le temps passé sur place qui ne dépassait pas une ou deux heures, la location d’un box n’était pas justifiée ; elle fait également valoir que le cheval était bien protégé au niveau des quatre membres de la même façon que le montre la photographie versée aux débats ; elle ajoute que l’animal a été blessé au-dessus de ses protections ; elle souligne que Madame F. a elle-même approuvé les bonnes conditions de transport après avoir visité le camion ayant servi au transport de l’animal ; que le véhicule était adapté au transport des chevaux et ne contenait aucune mangeoire ; elle fait également valoir qu’elle a immédiatement fait intervenir un vétérinaire ; Il est finalement demandé à la Cour de : Déclarer l’appel interjeté par Madame Sylvie F. mal fondé, La débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions contraires aux présentes, Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Madame Sylvie F. de l’intégralité de ses demandes dirigées à l’encontre de Mademoiselle Emilie L., Y ajoutant, Condamner Madame Sylvie F. à payer à Mademoiselle L. la somme supplémentaire de 1.000 euros sur le fondement de l’ article 700 du Code de Procédure Civile en sus des 1.300 euros précédemment alloués par le premier juge, A titre subsidiaire, Faire droit à l’appel provoqué incident de Mademoiselle Emilie L. à l’encontre de la clinique vétérinaire d’AMNEVILLE, Pour le cas où la Cour réformait la décision entreprise et entrait en voie de condamnation à l’encontre de Mademoiselle L. au profit de Madame F., Condamner la clinique vétérinaire d’AMNEVILLE sur le fondement de l’ article 1147 du Code Civil à garantir intégralement Mademoiselle L. des condamnations qui seraient prononcées à son encontre, Dans cette hypothèse, Condamner la clinique vétérinaire à payer à Mademoiselle L. une somme de 1.000 euros en application des dispositions de l’ article 700 du Code de Procédure Civile , Condamner Madame Sylvie F. et la clinique vétérinaire d’AMNEVILLE aux entiers dépens de première instance et d’appel lesquels seront recouvrés directement par la SCP CHARDON-NAVREZ, Avoués associés, conformément aux dispositions de l’ article 699 du Code de Procédure Civile . SUR CE : Eu égard au desistement partiel, il ne sera pas tenu compte des demandes de Madame L. envers la société SB VET ; Attendu qu’il résulte du contrat du 19 mars 2006, intitulé ’contrat d’exploitation avec mandat de vente’, que Madame F. a confié le cheval ’Lieutenant Dunbar Jyca’ à Madame L. en vue de sa vente avec hébergement de l’animal et possibilité de l’utiliser en compétition ; que tous les frais inhérents au cheval étaient à la seule charge de Madame L. qui, le cas échéant, pouvait conserver la totalité des gains en concours ; Que dans ces conditions, il y a lieu de considérer que le contrat doit s’analyser d’une part en un mandat de vente, d’autre part en un contrat de dépôt salarié, rémunéré par les gains de concours ; Attendu que le dépositaire à titre onéreux ne peut s’exonérer de l’obligation de moyens à laquelle il est tenu qu’en rapportant la preuve soit de son absence de faute, soit d’un événement de force majeure, soit du fait du déposant (cf cass. Civ.1ere 29/1/2002 n° 99-19.316) ; Attendu en l’espèce que c’est par des motifs pertinents que la Cour adopte que le premier juge a retenu que dans le cadre sus-indiqué, la responsabilité de Madame L. ne pouvait être engagée, alors qu’elle démontrait qu’elle n’avait commis aucune faute ; qu’il ressort en effet des différentes attestations produites que Madame L. a procédé au transport et à la mise en attente de l’animal dans des conditions habituellement mises en oeuvre par des pratiquants expérimentés de l’équitation (Madame B., Melle V., Melle D.), sans devoir recourir à l’utilisation d’un box, inutile en de telles circonstances en raison de la durée réduite de l’épreuve équestre (Melle S., Melle V.) ; que le véhicule utilisé n’était pas équipé d’une mangeoire et était adapté au transport des chevaux (Madame C.) ; Qu’il apparaît encore au vu de l’attestation de Melle D. que le cheval était sous la surveillance de celle-ci et équipé de protections de transport ; que Madame L. a réagi très rapidement et demandé l’assistance du vétérinaire de garde ; Qu’au vu de ces éléments de droit, et de fait, il y a lieu de confirmer le jugement ; Que succombant en son recours, l’appelante sera condamnée aux dépens d’appel, outre le paiement à Madame L. de la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’ article 700 du Code de Procédure Civile . PAR CES MOTIFS : LA COUR, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, CONFIRME le jugement déféré ; CONDAMNE Madame Sylvie F. à payer à Madame Emilie L. la somme de MILLE EUROS (1.000 euros) sur le fondement de l’ article 700 du Code de Procédure Civile ; CONDAMNE Madame F. aux dépens d’appel qui pourront être directement recouvrés par Me NAVREZ, conformément à l’ article 699 du Code de Procédure Civile . Le présent arrêt a été signé par Monsieur DORY, Président de la première Chambre Civile de la Cour d’Appel de NANCY, et par Madame DEANA, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. Signé : C. DEANA.- Signé : G. DORY.- Minute en huit pages.
Décision Antérieure Tribunal de grande instance Briey du 25 mars 2010 n° 07/00974
Note de la Rédaction : Critère(s) de sélection : décision très motivée
Abstract Contrat, qualification du contrat, cheval confié en vue de sa vente avec hébergement de l’animal et possibilité de l’utiliser en compétition avec conservation des gains, mandat de vente (oui), dépôt intéressé (oui), dépôt rémunéré par les gains des concours. Contrat, contrat de dépôt, classification des dépôts, dépôt intéressé, responsabilité contractuelle du dépositaire (non), inexécution de l’obligation de restitution, décès de l’animal, euthanasie à la suite d’une blessure lors d’un transport, preuve rapportée par le dépositaire de son absence de faute (oui), animal transporté pour un concours hippique, véhicule adapté au transports des chevaux, animal équipé de protections de transport, cheval sous la surveillance du déposant, assistance du vétérinaire de garde immédiatement sollicitée. © LexisNexis SA
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